Je poursuis donc cette série d’articles consacrée à mon processus de création par le plus important pour moi : les personnages secondaires. Si vous maîtrisez les personnages anecdotiques ou ponctuels, vous saurez tout à fait faire des personnages principaux qui tiennent la route, voilà pourquoi je vous parle d’eux en premier !
Qu’est-ce que j’entends par « personnage secondaire » ?
Tous ceux qui ne sont pas principaux. Et je mets ce terme au pluriel, donc, puisque j’estime qu’il y a une différence entre « héros /personnages principaux / narrateur ».
Le personnage secondaire ce n’est donc pas ce qu’on appelle parfois le « sidekick », c’est un personnage que l’on verra plus rarement dans le récit, mais à qui on aura donné consistance le temps d’au moins une scène.
Leur importance
Chez moi, ce sont eux qui font l’univers. Ce sont eux qui sont gardiens des mœurs de ce dernier. On apprend davantage de choses au travers de personnages secondaires qu’au travers des principaux protagonistes. Essentiellement parce que ces derniers s’imbriquent activement dans la trame, plutôt que de la subir pour la majorité.
Il ne peut y avoir de scène de bataille dans un film sans figurants, il ne peut y avoir de cohérence d’univers sans personnages secondaires, point.
Ce sont eux qui sous-tendent le récit et lui font prendre corps.
Qu’ils donnent la réplique aux personnages principaux ou qu’ils fassent un tout petit truc qui déclenche un effet papillon, ils ont un impact sur l’univers. Le point à retenir selon moi quand on écrit une histoire, c’est de ne rien négliger. Ils ont autant – si ce n’est plus – d’importance que vos personnages principaux.
Je ne dis pas qu’il est impossible d’écrire une histoire sans eux, je dis qu’un jeu vidéo ou jeu de rôles sans « PnJs » perd clairement en saveur et en profondeur niveau histoire.
Esquisser un personnage en quelques attributs efficaces
La raison pour laquelle c’est un exercice ultra important et formateur pour moi est simple : on n’a pas toujours le temps de développer un personnage secondaire. Il va peut-être intervenir une ou deux fois dans le récit. Deux choix s’offrent à l’auteur dans ces moments-là :
Décider de le faire intervenir « simplement », et on n’en parle plus / Montrer qu’une vraie personnalité vient de faire quelque chose.
== > Pour ce faire, quelques éléments sont incontournables, voici mes conseils :
- Ne faites pas de description physique trop poussée et classique. On se fiche de savoir sa couleur de cheveux, à moins que ça ait une incidence, préférez les détails très précis.
- Intéressez-vous à sa posture, sa démarche. Comment le personnage bouge-t-il ? Comment parle-t-il ? A-t-il des tics physiques ?
- Quelle est sa fonction ? Savoir cela serait-il utile pour présenter un caractère ? Pour expliquer sans avoir à le faire pourquoi il intervient ?
- Comment s’appelle-t-il ? Son nom a-t-il une poésie qui donne tout de suite le tempo ?
- Quelle est sa situation familiale ? Va-t-on le savoir ? Est-ce que ça révèle des choses à propos de lui ou de l’univers ?
- Pensez à introduire votre personnage en fonction du contexte. Qu’on ne le voie qu’une seule fois ou plusieurs, distillez des détails en fonction de la scène, cela éclairera votre propos et la cosmologie de votre univers.
- Pensez à ces jeux où vous devez faire deviner des gens ou des types de personnes en quelques mots.
Il y a une différence entre « Un agent administratif d’1m70, cheveux courts, bruns, yeux bleus… » et « Un grand dadais qui s’évertuait à relever le menton pour vous regarder par en bas, une perche aussi fine et sèche que le règlement intérieur et qui promettait que vous aviez grand intérêt à ne pas avoir oublié votre badge. »
Certes, la seconde est plus longue, mais on voit immédiatement que l’agent n’est pas commode. On imagine presque ce qu’il mange à midi, comment il se brosse les dents (en comptant les allers-retours pour être strictement dans les clous des recommandations des professionnels !)
Un personnage est une personne à part entière. Quand vous êtes à une terrasse et regardez les gens, vous les voyez évoluer devant vous, et très vite, vous imaginez des traits de caractère et des métiers, des situations familiales ; simplement sur la base de leur physique, posture, démarche, etc. La fiction demande la même chose.
L’habit ne fait pas le moine
Pour conclure, j’ajoute qu’à l’instar du monde réel, les clichés masquent parfois des personnalités très différentes de ce que l’on peut imaginer. Baladez donc vos lecteurs avec des personnages qui semblent être des archétypes de méchants ou de gentils, de salauds ou de sauveteurs, avant de les détruire. Soit entièrement dans un cliffhanger bien dosé, soit en les écorchant pour les rendre plus vivants encore.
Au boulot !