Le temps du listing de caractéristiques est révolu. Ou il devrait l’être.
C’est du moins ma conviction. Et quand on me demande de concevoir un script vidéo pour un spot promo d’un produit… je me fous des caractéristiques. Ou presque.
Ce qui va m’intéresser, c’est plutôt ce que fait la boîte, ce qu’est la boîte, quelles sont ses valeurs, qu’est-ce que le produit apporte ; bref, ce qu’il y a autour.
Quand Supernova est venu me trouver pour créer la vidéo de présentation de leur application de création de business-plan, je ne leur ai pas demandé comment fonctionnait cette solution.
J’ai passé 1h à discuter avec eux pour comprendre tout ce qu’ils mettaient derrière leur nom, leur logo, leur produit, ce qu’ils comptaient apporter aux gens.
Pourquoi faire ? Pour pouvoir imaginer des récits cohérents avec l’ADN marque et capables de mettre en avant cette dernière et son produit.
Parce que faire un script vidéo ce n’est jamais que traiter le sujet de la vidéo.
Quelle idée doit transmettre le storytelling du script vidéo ?
« Vous devez acheter notre super produit qui vous rendra heureux ! »
Non, vous savez évidemment que ce n’est plus comme ça qu’on fait des publicités, allons !
On veut transmettre une idée, des valeurs, et on va le faire à l’aide d’émotions. Votre cible doit, en voyant la vidéo, comprendre que la marque et/ou le produit correspond à ses attentes, à sa morale, répond à ses besoins.
Parce qu’à moins d’être dans une vidéo tuto, pour un tel sujet que celui que mon client me posait, il était inutile de faire une présentation assommante avec une vieille musique libre de droits, ou de partir sur le registre ultra éculé du désir. Et ce, même si un concurrent le fait.
Et mon client est malin (c’est même pour ça que c’est mon client et que je l’adore) : il m’a écoutée quand j’ai dit qu’il fallait qu’on fasse autrement. Et il a accepté de prendre le temps de me raconter son entreprise. Enfin, ils ont accepté, car ils sont deux : Nicolas Cabanel et Damien Ferracci.
Et c’est en me parlant de leur marque que j’ai compris leur UVP : Ce sont des facilitateurs et émancipateurs.
Instant rêve : On aurait eu le même budget que Ridley Scott, on serait sans doute parti sur une idée à la Prométhée, mais version business plan. Une sorte d’astronaute ailé, un peu méca, qui descend de sa fusée (et d’un ciel radieux) pour mettre un coup de pied dans une pile de feuilles à côté du bureau d’un-e entrepreneur-e en train de pleurer de désespoir face à l’ampleur de la tâche. Et l’astronaute lui glisse à la place dans la main un smartphone ouvert sur l’application Supernova. Mais… on n’avait pas ce budget. Pas encore.
Mais en dehors de toute frustration, les idées étaient mises en exergue, et j’ai donc proposé trois concepts articulés autour des trois idées principales de l’entreprise :
Dans mon document, je tease déjà au client l’idée première et l’angle d’attaque. Avant de dérouler ensuite ce qui sera potentiellement le spot.
Chacun reprendra le concept principal qui lui est rattaché et pourra explorer l’un des deux autres. Et c’est là qu’on se pose avec son carnet et qu’on réfléchit.
Parfois quelques minutes, souvent beaucoup plus longtemps.
Trois façons de communiquer à sa cible
Une cible marketing a plein de problèmes. Elle a aussi pleins de peurs. De rêves. De désirs.
Ça, vous le savez, c’est ce que vous avez appris.
Mais elle a aussi une culture. Publicitaire, cinématographique, musicale, sociale… bref, elle va associer des images et des sons à des concepts, des sentiments et des valeurs.
C’est cette richesse qui va permettre d’apporter de la narration à des contenus promotionnels. Des contenus qui peuvent être très différents des uns et des autres, et qui pourtant, serviront tous la même marque, parfois à la même époque.
Pour ma part, j’ai voulu donner le choix à mon client d’explorer trois narrations et angles différents. Parce qu’il s’agissait d’un lancement et que la marque n’avait encore jamais fait appel à quelqu’un comme moi pour ces aspects-là. C’était donc l’occasion de découvrir et préciser l’orientation narrative voulue par Supernova.
Ainsi, ils ont eu le choix entre :
- Le concept produit
- Le rêve client
- L’humour complice
Et cela s’est traduit par trois propositions différentes :
Il y avait d’autres idées, comme celle d’exploiter l’imagerie du Petit Prince en mode « Dessine-moi un business plan » où Supernova lui apprendrait carrément à le faire lui-même (parce qu’il commence un peu à nous gonfler ce minot !) et l’idée de baseline était « On ne monte son business qu’avec le cœur, les affaires n’ont pas besoin d’être difficiles à vos yeux. »
Mais c’était poussif…
Prise de décision : éviter les frictions
Pour trancher entre les trois concepts, les CEO se sont réunis avec leur Lead Project (a.k.a Thomas Cubel). Et chacun s’est projeté dans les spots… à la place des clients potentiels.
Le concept 3 était jugé marrant, mais potentiellement trop disruptif et décalé. Le genre de concept que l’on peut faire quand la marque est installée ou si sa narration est vraiment axée sur l’idée de briser les codes. Oui Supernova veut « changer les bails du business plan », mais non, elle ne veut pas le faire en ne s’adressant qu’à un public startup-compatible.
Le concept 2 a été jugé émouvant… mais dangereux : parce qu’il risquait de produire de la déception si le business plan d’une personne révèle que son projet n’est pas viable. Là, la fusée explose, l’astronaute est réparti aux quatre coins de son jardin. C’est moyen engageant.
Le concept 1, lui, mettait tout le monde d’accord.
Ça tombait bien, c’était le premier que j’avais écrit. Celui qui m’était immédiatement venu pendant la conversation. Celui que je visualisais parfaitement et qui est aujourd’hui en cours de réalisation. Il présente la notion d’utilité et de simplicité et s’il ne dit rien de l’accomplissement, il assure qu’on n’y perd pas ses nerfs.
À titre personnel, je savais que c’était celui-ci le plus efficace et qui serait sans doute pris. Mais j’ai tout de même réfléchi intensément aux autres options, car la marque était en recherche de clarification de son identité.
En matière de storytelling, je commence à me dire que l’instinct est un outil très puissant, même s’il ne faut pas rechigner à l’idée d’explorer d’autres pistes. Des fois que.
Ce travail entre la création et l’analyse, entre l’instinct et le méthodique, se fait à chaque conception de contenu et de storytelling. Et si le format de la narration diffère, les étapes de créations se ressemblent et l’enjeu reste le même : transmettre un métarécit en s’appuyant sur la culture de son public et sur les émotions qu’il est prêt à ressentir.
Finalement, concevoir des récits ne représente que la moitié du job. L’autre étant faite par la cible.